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Marche à suivre pour enfant trop gro
P our qu'un enfant trop gros motivé et aidé
par les adultes de son entourage (préalables
indispensables) guérisse de son excès
de poids, il faut et il suffit qu'il déséquilibre
sa balance énergétique.
Soit il augmente la dépense
liée à l'activité physique (il
bouge plus), soit il réduit ses apports énergétiques
(il mange moins). Mais «bouger plus »
sans contrôle du «manger» risque d'être
inefficace : l'augmentation de l'activité
physique peut entraîner une augmentation réactionnelle
et adaptative des apports énergétiques;
l'enfant trop gros qui se contente de «bouger
plus» peut «manger plus ».
De même, «manger moins»
sans contrôle du «bouger» peut tout
aussi être inefficace: la réduction
des apports énergétiques peut entraîner
une diminution réactionnelle et adaptative de
l'activité physique; l'enfant trop gros qui se
contente de «manger moins» peut «bouger
moins ».
Dans les deux cas, la balance énergétique
se rééquilibre et l'enfant conserve son
excès de masse grasse. Pour éviter le
rééquilibrage de la balance énergétique
à un niveau inférieur, il est nécessaire
d'en contrôler les deux plateaux.
0n peut proposer «manger moins et bouger comme
avant», ou «bouger plus et manger comme
avant», ou «manger moins et bouger plus».
Cette combinaison est plus compliquée puisqu'elle
implique des changements dans deux domaines bien différents
l'alimentation et l'activité physique.
Mais on peut en attendre une meilleure
acceptation et une moindre pénibilité
une réduction des apports et une augmentation
des dépenses de x kcal chacune paraît plus
supportable qu'une augmentation des dépenses
ou une réduction des apports de 2x kcal.
La proposition «manger moins» est précisée
et cadrée, selon les thérapeutes, par
une prescription diététique ou des consignes
comportementales ou une association [prescription diététique
+ consignes comportementales]. La proposition «bouger
plus» se décline, selon les thérapeutes,
en termes variables:
faire du sport, faire davantage d'activités
physiques, privilégier les jeux d'extérieur,
moins regarder la télévision, marcher
plus souvent, préférer l'escalier à
l'ascenseur...
Ces libellés répondent
mal aux exigences, telles qu'on les enseigne en Thérapeutique,
d'une bonne prescription: être justifiée,
efficace (rigoureuse, précise et adaptée),
réaliste et contrôlée.
«Marcher trente minutes chaque jour »
est une proposition qui répond assez bien à
ces critères et qu'on peut donc élever
au rang de prescription.
Marcher
La marche est une activité motrice simple. Il
est plus simple de marcher que de courir, ramper, rouler,
nager, sauter, glisser, pédaler ou taper dans
un ballon. La marche est bien codifiée elle consiste,
chez le bipède humain en position verticale,
à lever un pied pour le poser un peu plus loin
puis à recommencer avec l'autre pied. On a alors
accompli cette merveille motrice, banalement dénommé
un «pas», base du déplacement humain,
de la rencontre, de la conquête et de l'aventure.
La marche n'est qu'une suite de pas. S'y ajoute automatiquement
un balancement des membres supérieurs qui contribue
à maintenir l'équilibre. La marche est
un générique il n'y a pas de risque de
confusion entre les marques.
A moins d'être porteur d'un handicap neurologique
ou moteur, ce qui complique considérablement
le traitement, l'enfant trop gros a acquis la compétence
de la marche entre dix et dix-huit mois. La date de
cet événement tant attendu est d'ailleurs
souvent inscrite dans la mémoire familiale. Donc
l'enfant trop gros sait marcher. Il n'est pas nécessaire
de lui faire une démonstration ni de l'inscrire
dans un club pour qu'il apprenne.
La marche a des atouts. Elle peut être utile.
En marchant, on se déplace. Ce déplacement
peut être mis à profit. On peut marcher
pour aller à l'école ou chez un copain,
aller acheter le pain ou promener le chien. Atout supplémentaire,
on peut marcher et faire autre chose écouter
de la musique avec un baladeur (de «balade»
= promenade), bavarder côte à côte
ou main dans la main, chanter ou rêver, et maintenant
téléphoner (avec un «mobile»
= qu'on peut déplacer). On peut marcher en chantant
(marche militaire), en se mariant (marche nuptiale)
ou en pleurant (marche funèbre). Seule interaction
potentiellement dangereuse la lecture.
La mise en marche de la marche est une procédure
simple: 1. mettre ses souliers; 2. ouvrir la porte;
3. faire le premier pas; 4. continuer.
On peut marcher à n'importe
quelle heure, sans inscription préalable, sans
vêtements spéciaux, sans manger des glucides
lents avant ni des sucres rapides pendant, sans s'échauffer
avant ni se doucher après, sans entraînement
spécialisé ni moniteur particulier, sans
autorisation ni licence, sans certificat médical
ni surveillance régulière de l'état
de santé.
On peut marcher en sortant de chez
soi jusqu'à ce qu'on rentre. Il n'est pas nécessaire
d'être transporté pour aller marcher on
peut aller marcher en marchant et revenir en marchant.
La marche n'a pas besoin de temps mort, ni de pause,
ni d'arrêt de jeu.
La marche est efficace: la masse corporelle est alternativement
entraînée vers le haut, d'où une
dépense énergétique proportionnelle
à cette masse (ça tombe bien pour l'enfant
gros il est plus lourd), puis vers le bas, d'où
une dépense, plus faible, qui freine la descente
et évite l'écrasement au sol. A vitesse
constante, chez un enfant donné, la marche entraîne
une dépense d'énergie régulière,
modérée et constante.
Les mises en garde et les précautions d'emploi
sont réduites adapter vêture et chaussures
au temps qu'il fait (chaleur, froidure, pluie, neige),
éviter les rues marchandes peu marchantes, choisir
un parcours sécurisé, être accompagné
par un grand si on est petit, mais on a précisé
que l'aide des adultes était un préalable
indispensable.
Les contre-indications absolues sont rares: contre-indiquer
la marche revient à prescrire un repos strict.
Chez l'enfant, les indications d'un tel repos sont exceptionnelles.
Les effets indésirables de la marche sont limités.
La marche n'engendre pas de stress. Sur un trottoir
ou un chemin, le risque traumatique est faible. Les
accidents ne sont pas imputables à la marche
ce sont des accidents de la circulation. Sauf à
pratiquer le sport dit «marche athlétique
», le risque de glissement vers le dopage est
nul. La marche ne donne pas la grosse tête.
Marcher a un bon rapport qualité/prix. On peut
marcher sans payer de cotisation, ni investir dans du
matériel coûteux, ni souscrire une assurance.
Marcher est bon marché. On peut même économiser
le prix du bus.
Marcher n'est pas polluant. La contribution de la marche
à l'effet de serre est infinitésimale.
Marcher
trente minutes...
«Trente » est une valeur numérique,
plus précise que «un peu», «beaucoup»
ou «davantage». «Trente minutes»
est une dose précise. La posologie, indépendante
de l'âge et du poids, est facile à retenir
«trente minutes» pour l'enfant de deux ans
comme pour celui de quinze, pour l'enfant de 20 kilos
comme pour celui de 100. Certains disent <une demi-heure
».
Chronologiquement parlant, l'identité
[une demi-heure trente minutes] est incontestable. Mais
«trente» percute davantage que "une
demie".
« Trente » a des diviseurs sympathiques
2 et 3. «Trente minutes» est une dose facile
à fractionner en deux (quinze minutes matin et
soir, ou 15 - O - 15), voire en trois (dix minutes matin
midi et soir ou 10- 10- 10). Le fractionnement est utile
en cas de contreindication à l'effort prolongé
(douleur d'une ostéochondrose de croissance par
exemple).
On pourrait aussi fractionner en trente
fois une minute mais le pilulier nécessaire n'existe
pas.
«Marcher trente minutes» est une prescription
réaliste. La rotation de la terre autour du soleil
dure en général 24 heures. Trente minutes,
c'est à peine plus de 2 % du nycthémère.
Marcher trente minutes par jour, c'est consacrer 23
h 30 à ne pas marcher. Des périodes de
trente minutes, il y a en 48 dans 24 heures ; il y en
a en particulier tout au long de la journée,
du matin au réveil jusqu'au soir au coucher.
Trente minutes, c'est la durée d'une séance
de kinésithérapie respiratoire ou de rééducation
motrice, c'est le temps de cuisson d'un repas, c'est
à peine plus que le moment qui sépare
la fin du jité et le début du film, c'est
deux tiers d'un demi-match de foot. Trente minutes par
jour, ça n'empêche pas de faire ses devoirs,
de faire du sport, de regarder la télévision.
Trente minutes, c'est la durée du trajet aller-retour
quand le collège est à 1,2 km.
Si les parents sont deux pour aider leur
Jamiel 200
amiel 200, page 34
M (dcci rie & enf'aiire
enfant à marcher, la contribution de chacun tombe
à trente minutes tous les deux jours ou quinze
minutes par jour. Et la grande soeur ou le grand-père
peuvent marcher dans la combine.
Trente minutes, c'est nécessaire et suffisant
pour être efficace. Moins de trente, cela allongerait
trop la durée du traitement. Or, les résultats
trop lents réduisent l'observance thérapeutique.
Plus de trente, cela friserait « l'hypermarcher»
on risque l'intoxication différée (courbatures)
qui conduit à une redoutable fenêtre thérapeutique
autoprescrite. Trente minutes, c'est un compromis réaliste
entre les risques de sous-dosage et de surdosage. Trente
minutes de marche, ça ne se marchande pas.
Marcher
trente minutes chaque jour...
Le traitement d'une situation morbide chronique est
un traitement quotidien. On ne traite pas le diabète
un jour sur deux. On ne remet pas la pilule à
demain en prévoyant de doubler la dose.
Trente minutes de marche chaque jour, c'est trois heures
trente par semaine, l'équivalent d'une demi-journée
de marche. Mais une demi-journée de marche, c'est
pénible pour l'enfant, surtout l'enfant trop
gros dont on oublie parfois qu'il porte son excès
de poids*. Une telle épreuve laisse des cicatrices
inhibitrices. De plus trois heures et demie consécutives
de marche, ça donne faim. Et si on casse la croûte
pour juguler la faim, on casse le système qu'on
a mis en place manger plus parce qu'on a marché
plus, ça ne peut pas marcher.
Trois heures et demie par semaine à 4 km/h, cela
fait 14 km par semaine, un marathon toutes les trois
semaines, Paris-Colmar à la marche tous les dix
mois. Marcher trente minutes chaque jour, c'est marcher
trente minutes du lundi au dimanche, du 1er janvier
au 31 décembre inclus, les jours de classe et
les jours de congé, les jours ouvrables et les
jours fériés, les beaux jours et les mauvais
jours, les petits jours et les grands jours, les jours
de fête et les jours de deuil, les jours banals
et les jours anniversaires, les jours de départ
et les jours de rentrée, les jours en ville et
les jours en campagne, les jours Jet les jours J-1 (les
J + 1 aussi), les jours sans et les jours avec. On peut
marcher avec des lunettes, des drains transtympaniques,
un plâtre au poignet...
«Chaque jour», c'est chaque jour sans exception
parce que la première exception justifie la deuxième
et c'est le respect de la prescription qui devient l'exception.
Marcher trente minutes chaque jour pour un enfant trop
gros, la prescription est imprescriptible.
Marcher
trente minutes chaque jour...toujours?
Marcher trente minutes chaque jour. Jusqu'à quand
? En tout cas, jusqu'à la guérison, c'està-dire
jusqu'à disparition de l'excès de poids,
fin de l'action thérapeutique. Ensuite.., faut
réfléchir, faut voir.., par exemple le
tableau mural intitulé «De l'eau, de l'air
et de la lumière» de la série «Hygiène»,
dirigée par le Dr Galtier-Boissière, décoré
des Palmes académiques de l'Instruction Publique.
Ce tableau, édité par Armand Colin, adapté
à l'appareil de suspension des cartes murales
Vidal-Lablache préconise "Faites au moins
une lieue par jour".. Une lieue, c'est 4km; à
4 km/h, cela dure 60 minutes. Ce tableau mural est toujours
exposé dans l'école-musée de Champagny,
en Côte d'Or, à... une lieue des sources
de la Seine.
Conclusion
«Marcher trente minutes chaque jour», chez
un enfant trop gros, motivé et aidé (conditions
préalables), dont les apports énergétiques
sont contrôlés (association nécessaire),
c'est une prescription qui marche comme sur des roulettes.
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